L'HISTOIRE DU CHRISTIANISME

L’ÉGLISE PRIMITIVE 65-430

Dr. Timothy George 

L'histoire du christianisme est inextricablement liée à la personne et l'œuvre de Jésus-Christ. Dans l'un des premiers documents du Nouveau Testament, saint Paul écrit aux chrétiens de Galatie les mots suivants: «Mais quand la plénitude du temps est venue, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, pour racheter ceux qui étaient sous la loi »(Galates 4: 4).

Dans la plénitude du temps : Il y a deux mots différents pour exprimer le temps dans le Nouveau Testament. Chronos exprime le temps qui peut être mesuré, compté, divisé en minutes, heures, mois, années, siècles, etc. Chronos  c’est temps que nous expérimentons chaque jour .

Mais il y a un second mot grec pour exprimer le temps: kairos. Kairos c’est le temps comme moment opportun, le bon moment, le temps qui est porteur de sens et de signification. La foi chrétienne est basée sur le fait que l'événement de Jésus-Christ - sa vie, sa mort, sa résurrection - a changé pour toujours le sens du temps et l'histoire humaine dans sa totalité. Comme l'a dit l’apôtre Jean: «Le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous» (Jean 1:14). En Jésus, les chronos sont devenus kairos. L’avènement de Jésus est si important du point de vue du temps, que l’histoire humaine est divisée en deux périodes : avant et après la naissance du Christ (A.D = Anno Domini, latin pour «l'année du Seigneur» et A.C = Avant Christ).

L'étude de l'histoire chrétienne est enracinée dans la préposition la plus fondamentale de notre foi, à savoir que Dieu lui-même est entré dans la chaîne et la trame de notre existence humaine comme un bébé, né dans une crèche. Ainsi, l'étude de l'histoire chrétienne n'est pas un luxe, elle est une nécessité. Car le christianisme n'est pas avant tout une philosophie de la vie, ni un code de conduite, ni même un ensemble de rituels. Il est l'histoire de ce que Dieu lui-même a dit et fait, dans l'espace et dans le temps, en la personne de son Fils qui a vécu sur la terre et à travers l'œuvre de son Esprit à travers les âges.

Le mot «église» ne se retrouve que deux fois dans les Évangiles, uniquement dans l’évangile de Matthieu. En réponse à la confession de Pierre: «Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant», dit Jésus: «Sur cette pierre, je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle.» (Mt 16, 18).

L'histoire du christianisme est, dans une certaine mesure, l'histoire de l'accomplissement de cette prophétie du Christ. Le christianisme a commencé comme une petite secte du judaïsme palestinien. À la fin du premier siècle, il était déjà devenu une force importante au sein de l'Empire romain. Lorsque Jésus fut crucifié, le gouverneur romain, Ponce Pilate, demanda que les mots «Jésus, roi des Juifs» soient écrits sur sa croix en trois langues: l'hébreu, le grec et le latin. Ces trois langues représentaient les trois mondes dans lesquels les premiers chrétiens vivaient et témoignaient du Rédempteur crucifié et ressuscité.

LE MONDE DE LA RELIGION JUIVE 

Jésus était un juif, comme l'a été son plus grand interprète, l'apôtre Paul. Quand Paul a rappelé à son jeune disciple, Timothée, comment, dès son enfance, il a connu les Saintes Écritures par lesquelles il avait appris le chemin du salut, il se référait bien sûr aux Écritures hébraïques, que les chrétiens considéraient comme la parole Inspirée de Dieu accomplie en Jésus-Christ. L'une des décisions les plus importantes de l'Église primitive était la conservation de l'Ancien Testament comme écriture chrétienne. Cela signifiait que le Dieu de la création, le Dieu de l'alliance, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, n'était autre que le Dieu et le Père du Messie, Jésus.

LE MONDE DE LA CULTURE GRECQUE

Depuis le temps d'Alexandre le Grand, environ 300 ans avant le Christ, le monde méditerranéen  était unifié dans une culture intellectuelle commune que nous appelons l'hellénisme. Une nouvelle forme de la langue grecque, le koiné, (la langue commune) était devenue courante. Les écrivains du Nouveau Testament ont utilisé le grec koiné pour répandre le message de Jésus dans tout l'Empire romain. Le christianisme devait aussi s'attaquer à la tradition philosophique grecque, à l'héritage intellectuel de Platon et d'Aristote, au stoïcisme et à l'épicurisme. Tertullien, un père influent de l'église de Carthage, a posé une question célèbre: «Qu'est-ce qu’Athènes a à avoir avec Jérusalem?

Saint Paul lui-même n'avait-il pas dit que la prédication de la croix était une folie pour les Grecs, comme elle avait été une pierre d'achoppement pour les Juifs? (1 Corinthiens 1:18). Mais si le christianisme devait se faire entendre sur le marché des idées, alors certaines paroles et idées grecques devaient être «rebaptisées» avec un sens chrétien. Certains apologistes, comme Justin Martyr au deuxième siècle et Origène au troisième, siècle allèrent jusqu'à prétendre que la philosophie grecque, avec ses concepts d'ordre, de justice et de beauté, avait en fait préparé le chemin du Christ parmi les Grecs comme Moïse et les prophètes avaient fait parmi les Juifs. Mais jusqu'où pourrait-on aller dans cette direction sans perdre l'essence même de l'Évangile? Cette tension marquera l'histoire de la pensée chrétienne à travers l’œuvre de saint Augustin et bien au-delà.

LE MONDE SELON L'ORDRE ROMAIN

Depuis plus de 200 ans, le monde connaît une période de relative paix et de stabilité, connue sous le nom de Pax Romana. Pendant ce temps, l'église chrétienne est née. L'histoire de Jésus a été porté le long des routes principales et des routes maritimes bien développées de l'Empire romain dans tout le monde ancien. L'apôtre Paul était un citoyen de l'Empire romain, et a exhorté l'obéissance à l'autorité civile. Mais il savait aussi que l'allégeance politique antérieure du chrétien était à cette communauté céleste, «la Jérusalem céleste. »(Galates 4:26)

Dès le début, le christianisme était un mouvement missionnaire avec une vision mondiale et un message universel. Il était inévitable que le christianisme soit perçu comme une menace pour le système politique dominant, à la tête duquel se trouvait un homme qui était considéré comme un dieu: César. Si les chrétiens auraient disposés à adorer Jésus et César, à dire leurs prières au Christ et à placer une pincée d'encens sur l'autel de la divinité impériale, alors le conflit aurait pu être évité, car le pluralisme religieux était très en vogue dans l'Empire romain. Mais quand l'empereur Domitien s'arrogea le titre de Dominus et Deus («Seigneur et Dieu»), les chrétiens refusèrent de l’adorer. Pour eux, c’est Jésus seul qui est Seigneur, et non pas César. Ainsi le sang des martyrs ne tardera pas à devenir la semence de l'église.

Certains chrétiens, comme Ignace d'Antioche, ont fait face au martyre avec beaucoup d'empressement. À un groupe de croyants, il écrit: « J'espère obtenir par vos prières le privilège de combattre avec les bêtes à Rome. Permettez-moi d'être mangé par les bêtes, afin que je puisse être trouvé le pain pur de Christ. Attire les bêtes sauvages pour qu'elles deviennent ma tombe, et ne laissent aucune trace de mon corps. Alors je serai vraiment disciple de Jésus-Christ, quand le monde ne verra plus mon corps. »

La tranquillité, et même la joie, avec laquelle les martyrs faisaient face à la persécution et à la mort, était un grand témoignage de la puissance de la foi chrétienne. En effet, l'arène était devenue l'un des endroits les plus fructueux pour l'évangélisation dans l'église primitive. Beaucoup de ceux qui avaient été témoins de la mort des martyrs étaient devenus eux-mêmes disciples de Jésus. Avec le temps, les récits de la mort des martyrs se sont transformés en un nouveau genre de littérature dévotionnelle. Des récits de martyrs, comme ceux de l'évêque Polycarpe de Smyrne, et la noble femme catholique, Perpétue, et sa servante Félicité, furent lus à haute voix pour encourager les jeunes chrétiens à la fermeté et à l'espérance.

Un tournant majeur dans le sort du christianisme vint au début du quatrième siècle avec la conversion de l'empereur Constantin. Sous deux empereurs antérieurs, Decius et Dioclétien, les chrétiens avaient été sauvagement réprimés ; les églises détruites, les Bibles brûlées et plusieurs perdirent la vie à cause de leur refus de sacrifier aux dieux païens. Mais plutôt que détruire le christianisme, ces persécutions ont stimulé sa croissance et son expansion. Le christianisme avait pénétré tous les niveaux de la société romaine, y compris la noblesse et l'armée, dont certains membres faisaient face à la mort plutôt que de renier leur Seigneur.

En tant que soldat avec des ambitions politiques, Constantin était au courant des questions religieuses de l'Empire. Il avait lié son destin personnel au dieu soleil, Sol Invictus, une divinité revendiquant la domination universelle dans toutes les parties de l'empire. Cependant, comme il se préparait pour une bataille au pont de Milvian près de Rome, le 28 octobre 312, il eut un rêve dans lequel il lui a été dit de placer le signe de Christ, le Chi Rho, sur les boucliers de ses soldats. Selon une autre version de cette histoire, il a également vu les mots suivants écrits dans le ciel: In hoc signo, vinces, «Par ce signe, tu vaincras». Constantin a remporté la bataille du pont de Milvian. Une fois devenu empereur, Constantin changea son allégeance du dieu du soleil au Fils de Dieu, Jésus-Christ, le vrai soleil de justice. 

La conversion de Constantin a été sans cesse débattue par les historiens. Etait-ce le résultat d'une intervention divine ou simplement un acte politique? Quoi que soit l’interprétation que nous donnions de cet événement, elle a eu des conséquences énormes pour l'histoire de l'église. En effet, en 313, l'Édit de Milan reconnaît le christianisme comme une religio licita («une religion légale»), à tolérer avec les autres religions de l'empire. Avec le temps, cependant, l'accommodation a cédé place à l'assimilation, et a fait du christianisme la religion officielle de l'empire. En 321, le jour de dimanche a été déclaré le jour saint officiel. Le 25 décembre, fête du Sol Invictus, est devenu le jour de la célébration de la naissance de Jésus-Christ. La christianisation de l'Empire romain a apporté de nombreux avantages à l'église chrétienne, mais elle lui a aussi apporté bien de défis.

Dans la suite, le christianisme n’était plus seulement toléré, mais il était exigé de tous. L'empereur Théodose II ne permettait qu’aux chrétiens de servir dans son armée. Les non chrétiens, et même les dissidents chrétiens, tels que les donatistes en Afrique du Nord, étaient persécutés. En moins de deux générations, l'Église chrétienne est passée d'une minorité illégale à la religion dominante. Les chrétiens persécutés dans le passé, étaient devenus persécuteurs des non chrétiens.

UN NOUVEAU SENS DE L'HISTOIRE

Les premières générations de chrétiens attendaient la fin imminente du monde, et le retour de Jésus-Christ avec puissance et gloire. Au deuxième et au troisième siècles, par exemple, un groupe de chrétiens charismatiques, connus sous le nom de Montanistes, a présenté une série des prophéties concernant la date et le lieu du retour du Christ. Ils ont exhorté les chrétiens à se séparer du monde et de vivre une vie ascétique, en anticipation du dénouement apocalyptique de l'histoire. Au fil du temps, cette ferveur apocalyptique commença à diminuer.

Bien que les chrétiens professaient toujours leur foi en la seconde venue de Christ, ils ne l’attendaient plus avec urgence comme dans le passé. Ce n'est pas un hasard si la première véritable histoire de l'Église chrétienne a été écrite au IVe siècle par Eusèbe, un évêque de la Palestine. Eusèbe a également écrit la biographie officielle de Constantin dans laquelle il se référait à lui comme le «treizième apôtre», le visage du nouvel Israël de Dieu. Pendant son règne, les chrétiens commencent à ériger des grands temples. L'architecture de l'église est née lorsque les chrétiens sont passés de la célébration du culte dans des grottes et les catacombes, à la célébration du culte dans des beaux temples et basiliques. La mère de Constantine, Helena, était influente dans le développement de cette architecture sacrée. Par exemple, elle avait supervisé, elle-même, la construction des temples sur les sites présumés de la naissance du Christ à Bethléem, et de sa mort à Jérusalem. En 333, nous lisons que des pèlerins de Bordeaux visitaient la Terre Sainte comme un acte de dévotion religieuse. «Les visites guidées de la Terre Sainte» étaient devenues un secteur prospère et l’est resté jusqu’à ce jour!

UNE NOUVELLE FORME DE SPIRITUALITÉ

Quand l’église était persécutés, ceux et celles qui mourraient comme martyres étaient considérés comme des grands saints.  Mais maintenant que le christianisme était devenue la religion d’état, et qu’il souffrait de laxisme moral, une nouvelle forme de martyre s’était développée, c’était le « monachisme. »

Saint Antoine est considéré comme le père du monachisme.  Un jour, à l'âge de 18 ans, quand il entrait dans une église, il écouta la lecture des paroles suivantes de Jésus: «Si vous voulez être parfait, allez vendre tout ce que vous possédez, donnez-le aux pauvres, venez, et suivez-moi »(Luc 18:22). Immédiatement, il sortit, obéissant littéralement aux paroles qu'il venait d’entendre.  Il vendit toutes ses possessions, les donna aux pauvres, et se retira dans le désert d'Égypte, où il vécut seul dans des tombeaux, livrant bataille contre les forces des ténèbres. Finalement, des milliers d'autres chrétiens suivirent Antoine dans sa retraite monastique.

Les moines étaient les successeurs des martyrs.  Ils représentaient une nouvelle forme de la milice du Christ ; combattants contre l’influence négative du monde, de la chair et du diable. En Syrie, une forme unique de vie monastique s'était développée autour des leaders chrétiens considérés comme des saints, dont le plus célèbre est Siméon Stylites, mort en 459. Il construisit un pilier de pierre, d'environ 70 mètres de hauteur, sur lequel il menait une vie de prière ascétique pendant plus de 30 ans. Sa nourriture quotidienne lui était hissée par un groupe de fidèles, qui campaient au pied de son édifice en pierre.

Une forme plus simple du monachisme était plus tard développée par Pacôme et Basile le grand.  C'était le monachisme "cénobitique", de l’expression grecque koinos bios ("vie commune"). Le monachisme cénobitique mettaient l'accent sur la vie en communauté.  Il encourageait la prière communautaire, le travail manuel et l'obéissance à l'abbé, ou le chef de la communauté. La «règle de Basile» est devenue le manuel standard pour le monachisme cénobitique en Orient ; la forme du monachisme qui a été la plus pratiquée dans l'église pendant cette période. Le monachisme exerçait une forte influence sur la dévotion chrétienne. Ce n'est pas par hasard que saint Augustin, le plus grand de tous les pères de l'Église, fut profondément ému et attiré vers la vie monastique après sa lecture de la biographie de saint Antoine.

LE DÉVELOPPEMENT DE LA THÉOLOGIE CHRÉTIENNE CLASSIQUE

Ensemble avec une nouvelle histoire et une nouvelle forme de communauté chrétienne et de spiritualité, les IVe et Ve siècles ont vu aussi la naissance de l'orthodoxie chrétienne classique, en ce qui concerne les doctrines fondamentale de la Sainte Trinité, et de la Christologie. Dès le début, la théologie chrétienne était préoccupée par la question que Jésus avait posée à ses disciples concernant sa personne : «Qui dites-vous que je suis? » (Matthieu 16:15). La communauté chrétienne a répondu à travers la confession de Pierre: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant."

Les premiers débats théologiques relatifs à la nature de Dieu et  à la personne du Christ étaient souvent provoqués par des groupes hérétiques chrétiens, tels que les Gnostiques, qui essayaient de séparer le Dieu de la création du Dieu de la rédemption. Selon les Gnostiques, comment est-ce que l'Eternel Dieu, aurait-il pu assumer la chair humaine ? Ou comment est-ce que le Fils éternel de Dieu aurait-il pu posséder un corps matériel? Pour ces derniers, Jésus ne pouvait être un véritable être humain. Pour eux, lorsque Jésus marchait le long des rives de la Galilée, ses pieds ne laissaient aucune empreinte dans le sable etc. Contrairement à cet enseignement erroné, l'église a énoncé une règle de foi, les principes de base de la croyance chrétienne traditionnelle.  Les questions de la règle de foi étaient posées à chaque nouveau chrétien au moment du baptême. Ce que nous appelons aujourd'hui les Actes des Apôtres, s'est développé à partir de ce genre de confession baptismale de foi. 

En voici le modèle :

« Croyez-vous en Dieu le Père Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre? »

(A quoi le nouveau chrétien répondait), « Pisteuo, je crois ».

« Croyez-vous en Jésus-Christ, conçu par le Saint-Esprit, né de la Vierge Marie, et a souffert sous Ponce Pilate? »

« Pisteuo. »

« Et croyez-vous au Saint-Esprit, à la sainte Église catholique, à la résurrection du corps et à la vie éternelle? »

« Pisteuo. » 

Toutefois, la question fondamentale de la relation entre Jésus de Nazareth et le Dieu éternel qu'il appelait Père, demeurait encore sans une solution qui soit conforme aux Saintes Écritures.  Dans sa forme la plus fondamentale, la doctrine de la Trinité constitue la réponse de l'église chrétienne à cette question cruciale.  La doctrine de la Trinité réconcilie l'affirmation de l'Ancien Testament: «Ecoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est un» (Deutéronome 6: 4), avec la confession du Nouveau Testament affirmant que «Jésus-Christ est Seigneur» (Phil 2: 511). La question de la Trinité n'était pas simplement un problème de sémantique ou un jeu de mots philosophiques. Cette question est allée à la racine même de la piété chrétienne, sachant que Jésus est l’objet des prières et de l’adoration de l’église. 

Au début du IVe siècle, la question a provoqué un conflit acharné entre Arius et Athanase, l'évêque d'Alexandrie. Arius a insisté sur l'unicité et la transcendance de Dieu. Arius insiste sur le fait que l'essence de Dieu est indivisible, et ne peut, par conséquent être partagée avec un d'autre, y compris son Fils. Par conséquent, selon Arius, le Logos, le Fils, doit être une créature. Le Fils aurait un commencement.  Arius affirme : « Il y avait, quand il n'était pas. » Et Dorothy Sayers écrit : « Si vous voulez la doctrine du Logos selon Arius : Dieu l'a engendré, et avant qu'il n’ait été engendré, il n'était pas. " 

Contrairement à  la position d’Arius qui considérait le Christ comme une créature, Athanase proclama la théologie du Logos homoousios (de même essence que) que le Père. Selon Athanase, une simple créature,  même exaltée, ne pouvait expier nos péchés. Seul Dieu Lui-même pouvait nous délivrer du péché et de la mort. En 325, l'Église adopte la théologie d’Athanase sur la nature du Christ au concile de Nicée qui affirme:  « Nous croyons en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, éternellement engendré par le Père, Dieu de Dieu, Lumière de Lumière, Vrai Dieu de Vrai Dieu, engendré, non fait, d'un seul être avec le Père. Par lui toutes choses ont été faites. Pour nous, hommes, et pour notre salut, Il est descendu du ciel. » 

Le Concile de Nicée n'a pas mis fin aux controverses sur la Trinité.  Celles-ci ont continué, ensemble avec les débats sur la divinité et l'humanité du Christ. Le concile de Constantinople en 381, le concile d'Éphèse en 431 et le concile de Chalcédoine en 451 ont tous contribué à la résolution des questions doctrinales soulevées, qui forme dorénavant l'orthodoxie œcuménique.  L’orthodoxie œcuménique enseigne que: Dieu est un en essence, c’est-à-dire dans son être, et trois en personne. Père-Fils-Saint Esprit.  Jésus-Christ est une Personne en deux natures : Dieu et homme. Vers la fin de la période patristique, saint Augustin écrivit un traité théologique massif appelé : De Trinitate (Sur la Trinité). De Trinitate résume toute la tradition orthodoxe concernant Dieu ; il souligne l'unité et l'égalité du Père, du Fils et de l'Esprit Saint, ainsi que la dynamique personnelle des relations de personne dans l’essence divine. Dans ce domaine, comme dans beaucoup d'autres choses, la théologie de saint Augustin a laissé une empreinte indélébile sur la pensée chrétienne de tous les temps.

LES TRADITIONS DE L'ANTIQUITÉ TARDIVE

Saint Augustin était parvenu à la foi chrétienne par une recherche intellectuelle et spirituelle tortueuse. Il est né en 354 à Tasgate en Afrique du Nord, en Algérie moderne. Son père, Patricius, n'était pas chrétien, mais sa mère, Monique, était une croyante pieuse qui avait une influence dominante sur la vie et le développement de son fils, Augustin. 

Pendant sept ans, Augustin a suivi les croyances manichéistes ; une religion radicalement dualiste avec des racines dans la Perse antique. Puis il devint sceptique, mettant en doute la vérité et le sens véritable des choses. Enfin il se tourna vers le néo-platonisme, qui lui offrait un modèle de transcendance, le pointant au-delà du monde visible du flux du temporel vers l'éternel. Les sermons d'Ambroise, évêque de Milan, le rapprocheront de la foi chrétienne. Mais il résistera encore, jusqu'au jour où assis seul dans un jardin, il entendit un groupe d'enfants chanter une chanson en jouant: Tolle lege, tolle lege, «Prends et lis, prends et lis». Immédiatement, il prit une copie des Écritures Saintes, et lu dans Romains 13 (Romains 13: 11-14).

Cet événement a été un tournant dans sa quête de Dieu. Il fut baptisé par Ambroise un dimanche de Pâques en 387. Augustin décrit son pèlerinage spirituel dans une œuvre qui est devenue un classique pour l'autobiographie chrétienne: Les Confessions. Adolf Von Harnack, un historien de la doctrine chrétienne  a autrefois qualifié Saint Augustin d’être le « premier homme moderne. » Mais on pourrait aussi bien l'appeler le premier homme du moyen âge, car sa vie et sa théologie ont exercé une influence profonde sur les mille ans de l'histoire chrétienne qui s’étendent entre sa mort, 430, et la naissance de Martin Luther en 1483, autre moine augustinien. Saint Augustin n'était pas seulement un grand théologien, il était aussi un homme d’église : un évêque actif, un berger d'âmes. Ses écrits traitent des sujets  relatifs aux divers problèmes auxquels étaient confrontés les chrétiens ordinaires de l'époque, à savoir: la nature des sacrements, la discipline de l’église, et la pénitence, le culte et la prière, la façon de vénérer les martyrs et les saints, comment étudier, enseigner et prêcher la Parole de Dieu. Dans ses débats avec le moine britannique, Pélage, Augustin expose une théologie de la grâce et du salut de Dieu, qui met l'accent sur l'impuissance des êtres humains de parvenir au salut en dehors de la grâce de Dieu.  L'église reconnaîtra plus tard saint Augustin comme le précieux Doctor Gratiae, « le Maître de la grâce ».

Avec la mort de saint Augustin en 430, s’achève le monde de l'antiquité classique, donnant lieu à un millénaire de turbulence dans la chrétienté occidentale. Dans sa longue vie de chercheur chrétien, d’évêque, d’ascète et de théologien, saint Augustin a eu le temps et le privilège de résumer les grands thèmes de l'ère chrétienne. Sa vision de Dieu et sa description de la vie chrétienne formeront la base de nombreux courants qui ont marqué l’époque médiévale.

Il est correct d’affirmer que saint Augustin est né, quand le sang des martyrs était encore chaud et humide dans la mémoire chrétienne. Et il était mort, quand l'église était devenue forte dans le monde, au point d’assumer l’intérim du défunt empire romain dans la formation d'une nouvelle civilisation. Mille ans plus tard, protestants et catholiques réclament Saint Augustin comme précurseur de leurs propres efforts pour faire progresser la cause du Christ.

 


Última modificación: martes, 21 de marzo de 2017, 14:17